Immigration : La chute de Bachar El-Assad relance la question de la prise en charge des exilés de guerre.

1/15/2025

Alors que la Syrie semble sortir d’une décennie de conflit civil et que l’ancien dirigeant est en fuite, les pays européens se sont rapidement posés la question du sort des réfugiés syriens sur leur territoire.

L’offensive menée par le groupe islamiste « Hayat Tahrir Ash-Sham » dès le 27 novembre 2O24 a mené à la chute du dirigeant syrien le 8 décembre, suscitant l’espoir auprès de millions de syriens sur le territoire en proie à la répression sanglante d’El-Assad depuis plus de 13ans de crise. De l’espoir également auprès des déplacés qui ont pu fuir le pays, l’Agence des Nations pour les réfugiés comptabilisent environs 13 millions de déplacés depuis 2011. 

Si l’on ne sait encore rien de ce groupe armé qui a réussi à faire fuir Bachar vers Moscou et que la communauté internationale souhaite que soit mis en place un gouvernement démocratique, la question des exilés se pose déjà au sein des pays européens. En effet, au lendemain de la fuite du dirigeant syrien, l’Autriche et l’Allemagne entre autres ont fait savoir qu’ils souhaitaient mettre en pause les traitements de demande d’asile en cours. Cela signifie que des dizaines de milliers de personnes en attente de protection vont voir leurs démarches administratives tout simplement arrêtées dans l’attente d’une décision des gouvernements d’accueil. Cette décision vient renforcer la situation incertaine et précaire de ceux qui ont déjà tout perdu.

Lors de la conférence donnée le 12 décembre, Magnus Brunner, le commissaire aux Affaires intérieures et à la Migration autrichienne s’est voulu rassurant en indiquant qu’il n’était pas encore question de faire des retours forcés. Le commissaire souhaite privilégier des retours volontaires et se dit prêt à mettre en place des incitations financières si cela est nécessaire pour encourager les syriens en attente à retourner d’eux-mêmes en Syrie. Magnus Brunner a également évoqué la possible collaboration entre les pays d’accueil européens autour d’une directive concernant les retours. 

En Allemagne, la ministre de l’intérieure Nancy Faeser a dit geler les demandes d’asile en cours tout en surveillant l’évolution de la situation sur place et le gouvernement que mettra en place le groupe islamiste. Cette décision prise par l’Allemagne au lendemain même de la chute du régime syrien est lourde de conséquence car le pays est le premier Etat d’accueil pour les exilés en Europe et nul ne doute que certains Etats vont suivre leurs mesures mises en place sur le territoire.

En France, le ministre de l’intérieur Bruno Retailleau avait évoqué la possible suspension des demandes d’asile en cours d’examen au lendemain de la chute de Bachar El-Assad. Le temps de la réflexion, lors d’un entretien accordé à BFMTV le 18 décembre, le ministre a confirmé cette suspension en la justifiant comme une mesure de protection contre de potentiel anciens du régime qui voudraient s’immiscer en France. Le 5 janvier, le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a affirmé que les 700 demandes d’asile syriennes en instructions par l’Ofpra (Office français pour la protection des réfugiés et des apatrides) étaient suspendues dans l’attente de l’évolution de la situation politique. La question des retours de certains syriens déjà sous protection de statut de réfugié a également été évoquée. Cette mesure inédite que la loi ne permet pas en principe se veut humaniste en permettant à ceux qui le souhaitent d’aller dans leur pays d’origine pour prendre des nouvelles de leurs proches puis revenir.

Ce qui peut surprendre ce n’est pas la rapidité que ces pays ont mis face à ce nouveau bouleversement dans la région déjà sous très forte tension, mais plutôt l’objet de ces réactions et commentaires qui se font sous le prisme de l’immigration uniquement et peu sous celui de l’humanité. Si certains syriens sont volontairement retournés dans leur pays après la fuite de l’ancien dirigeant, d’autres ne ressentent pas ce désir mais plutôt la crainte du futur. On peut supposer que la vague réactionnaire importée par la montée des parties d’extrême droite et qui parcourt le continent européen actuellement y est pour quelque chose. L’extrême droite qui gagne en terrain à chaque élection implante ses idées et ses peurs dans les esprits et l’immigration est une des grandes peurs du camp extrême. La responsabilité des Etats se posent lorsqu’ils sont prêts à renvoyer à leur sort des réfugiés dans un pays dont on ne connait pas encore le chemin la feuille de route